Lundi 15 avril 2024
Spéléo, visite
Grotte d’Aldène ou de la Coquille, Cesseras (34)
Participants :
DRAC : Philippe G.
Société Cévenole de Spéléologie et de Préhistoire SCSP : Jean-Pierre B.
ITP et Spéléo Corbières Minervois : Jean-Noël D.
Spéléo Corbières Minervois : Christian A. (Kinou), Dominique B. Véronique M.
Invité FFME : Gérard
TPST : quatre heures
Philippe, que la quasi-totalité des topis connaissent – et pour celles et ceux qui ne le connaitraient pas il était un des experts de la grotte de Lanincu à Lano -, est le « gardien » de la grotte d’Aldène située dans l’Hérault près de Minerve dans la vallée de la Cesse et connue pour sa galerie remplie d’empreintes de pas du Néolithique. La cavité est fermée au public et il faut passer, soit par la mairie de Minerve, soit par l’Association d’Aldène, soit par Philippe pour pouvoir la visiter.
La cavité se développe sur trois niveaux sur le bord droit de la Cesse. Le niveau 1 accessible par un gigantesque porche d’entrée a fait l’objet d’une exploitation de soi-disant phosphates au 19e siècle, en fait il y avait pas mal de guano. Malheureusement cette exploitation a détruit de nombreux vestiges préhistoriques. Il reste cependant une galerie comportant quelques peintures pariétales (que nous n’avons pas visitée). Ce niveau est également l’habitat de nombreuses colonies de chauves-souris et présente de nombreux artefacts de biocorrosion. Début 20e siècle, une désobstruction a permis d’accéder au niveau 2 situé une trentaine de mètres plus bas par une faille très étroite qui heureusement a fait l’objet d’élargissement et d’équipements. Le niveau 3 est celui qui donne accès à la rivière souterraine de La Cesse, prolongement du Réseau André visité le 8 octobre 2023 et que nous irons visiter en juin prochain.
Après avoir rencontré Philippe lors de l’AG du CDS 11, on a pu organiser cette visite avec 6 personnes maximum. Cela fonctionne par cooptation.
On retrouve donc Philippe à 9 heures au parking de Fauzan en bordure du canyon de la Cesse. Un sentier taillé dans le roc calcaire et équipé de mains courantes permet d’accéder au sentier longeant la falaise. Le spectacle sur les gorges est magnifique.
Philippe nous explique la formation de la vallée de la Cesse et de ses cavités et détaille les conditions de visite de la cavité. Éclairage aux Leds cela va de soi, combinaisons propres c’est prévu, pas de photos ! (ce que j’ai ajouté a été trouvé sur le net, la biblio est riche), ne pas sortir de sentiers balisés. Oui chef !
Pour entrer, une serrure inviolable, une grille digne d’une enceinte de prison. La galerie du niveau 1 est vraiment conforme à l’appellation « métro », plus de 20 à 30 m de large et haute de 15 à 20 m ! Nous voilà devant la lucarne d’accès au réseau inférieur, là aussi porte blindée avec serrure ad hoc. La descente se fait par échelles et barreaux scellés entrecoupés de quelques plateformes. Pas d’étroitures alors qu’au début des explos d’après Philippe, certains passage nécessitaient au moins 25 mn d’effort. Et il était plus mince à l’époque.
Nous voilà dans les galeries du niveau 2, moins spacieuses – 2 à 4 m de large et plafond à 2,50 m en moyenne. Galeries de surcreusement. On parcourt quelques centaines de mètres et on arrive à un carrefour. À gauche débute la fameuse Galerie des Pas, découverte en 1948 par l’abbé Cathala, en face la galerie menant au niveau 3. Avant d’arriver aux Pas, Philippe nous montre sur les parois les différents mouchages de torches. Longue explication sur le travail des archéos qui ont réussi à déduire la longueur, le nombre et la nature des tiges qui ont été enflammées (très certainement du genévrier). Déductions également sur le sens de parcours, la taille des porteurs, leur progression… impressionnant ! Et à un niveau de la galerie plus rien, ils en ont déduit que le groupe avait fait demi-tour, peut-être à court d’éclairage. Remarquable aussi les coprolithes de hyènes, leurs ossements et leurs bauges. Une bauge avec l’empreinte du squelette de hyène avec la trace d’un pas. Quand les humains sont passés les hyènes avaient déjà disparu.
Voilà la Galerie des Pas, pour la visite la progression se fait sur une plateforme métallique fixée en paroi. Auparavant il faut bien s’essuyer les chaussures, éteindre son éclairage et les pas se devinent grâce à l’éclairage frisant de la torche de Philippe. 400 empreintes de pas de 26 individus (hommes, femmes et enfants) du mésolithique (-8 000 ans) et la façon dont ils se sont déplacés dans la galerie…
On écoute en silence les explications détaillées sur la caractéristique de ces pas. Là un jeune adolescent qui a sauté par-dessus un bloc, là une femme qui portait son enfant, là quelqu’un qui a glissé. Beaucoup de ces détails ont été obtenus grâce aux apports conjugués des techniques scientifiques actuelles (scanner 3D, laser, photogrammétrie, prélèvement, moulages…) et aux observations de trois pisteurs namibiens invités à analyser ces traces en fonction de leur connaissance du terrain.
La galerie continue ensuite jusqu’à un lac et à une zone d’effondrement qui était l’entrée naturelle et qui a du se fermer peu de temps après le passage de ces humains. On retient que c’est une tribu d’environ 26 individus qui aurait fait un seul aller et retour dans la galerie. Par curiosité, pour la recherche d’eau ?
On revient sur nos pas pour reprendre la galerie menant au niveau 3 jusqu’aux griffades et bauges d’ours et de hyènes. Un toboggan argileux recouvert de griffures de hyènes et au fond d’un boyau borgne un peu rastèg, une énorme bauge d’ours avec des griffures, on peut se demander comment il est arrivé là. Retour en bas du toboggan où nous attendait Véronique, peu tentée par le boyau, on laisse l’accès à la rivière à gauche et c’est le retour.
Remontée sans difficultés des échelles, et on retrouve le soleil un peu venté et la matinée se terminera autour d’un spuntinu, malheureusement sans Philippe qui a du nous quitter.
Une belle aventure archéo/spéléo.
La biblio sur Aldène ne manque pas, entre autres :
JND